L’accouchement est une étape que toutes les futures mamans redoutent, notamment sur le point de vue de la douleur que cela engendre. Mais avec le progrès de la science, il est désormais possible de la soulager grâce à la péridurale, une pratique mise au point au début du XXe siècle qui est désormais courante. D’ailleurs, même controversée, 85 % des femmes qui accouchent pour la première fois décident d’y recourir pour un accouchement par voie basse ou par césarienne. Zoom sur cette méthode d’anesthésie et réponse aux principales questions sur cette technique en compagnie de la spécialiste Annie Belmont, qui accompagne les accouchements en clinique depuis plus de 5 ans .

 

La péridurale : de quoi s’agit-il ?

Si certaines femmes arrivent à maîtriser la douleur au moment de l’accouchement, d’autres peuvent vivre une expérience intolérable. Pour qu’elles l’évitent et que l’enfantement se déroule sereinement, elles peuvent recourir à une anesthésie locorégionale : la péridurale.

Cette pratique vise à insensibiliser toute la partie inférieure du corps pour soulager les futures mamans au moment d’accoucher. C’est effectivement une anesthésie locorégionale qui endormira « l’espace péridural » (entre la dure-mère, enveloppe méningée la plus externe, et les vertèbres) dans la région lombaire grâce à un produit anesthésiant. Il est injecté dans le dos entre deux vertèbres lombaires, pendant le travail. Il se répandra ensuite progressivement dans les nerfs autour de la moelle épinière et insensibilisera toute la partie de l’utérus, du plancher pelvien et du périnée.

 

Existe-t-il plusieurs techniques pour réaliser une péridurale ?

Effectivement, la future maman peut choisir entre :

  • l’injection d’un anesthésique à dose unique et de longue durée d’action
  • l’injection de l’anesthésique de façon continue grâce à l’introduction d’un cathéter, un tube mince et flexible, dans l’espace péridural

Dans les deux cas, les effets de l’injection sont rapides, car les douleurs des contractions seront presque totalement atténuées 15 à 30 minutes plus tard. Ils dureront pour des opérations entre 2 et 3 heures au maximum.

L’anesthésiste peut également administrer de plus faibles doses du produit anesthésiant, essentiellement pour les accouchements par voie basse. Dans ce cas, ses effets seront plus longs, entre plusieurs heures, voire jusqu’à deux jours.

Pour soulager encore plus les femmes qui accouchent, d’autres techniques de péridurale ont été récemment mises en place comme :

  • la péridurale déambulatoire : cette technique consiste à laisser la future maman continuer de marcher durant le travail sans devoir rester allongée ;
  • la péridurale auto-contrôlée (ou PCEA) : comme l’indique son nom, ce sont les femmes elles-mêmes qui s’administrent les doses qu’elles souhaitent en appuyant uniquement sur un bouton.

Grâce à ces deux dernières méthodes, il est désormais possible de sentir le bébé descendre sans ressentir une intense douleur. Tout l’art est donc dans le dosage des agents qui constituent l’anesthésie.


Explication vidéo réalisée par les Hôpitaux Universitaires de Genève.

 

Le déroulement pas à pas

Lorsque la patiente est en travail, l’intervention est généralement réalisée vers les 5 cm de dilatation du col de l’utérus. Elle peut donc se pratiquer avec les jambes repliées sur le menton, mais également allongé sur le côté, ou encore en position assise. Cela dépend de l’état de la future maman ainsi que des habitudes de l’anesthésiste. Dans tous les cas, il est primordial de désinfecter la zone où se fera la piqûre puis de pratiquer une anesthésie locale afin d’insensibiliser la peau. Il est également nécessaire de contrôler le rythme cardiaque et la tension artérielle de la future mère puis de mettre en place une perfusion intraveineuse au préalable.

La péridurale proprement dite se pratique à l’aide de l’aiguille appelée de Tuohy, longue de 8 à 11 cm montée sur une seringue remplie de sérum physiologique. Elle est introduite progressivement dans la zone désinfectée à cause de la résistance à la pression sur le piston de la seringue. Une fois que cette résistance disparaît brutalement, le praticien est entré dans l’espace péridural.

 

 

À quel moment est-elle administrée ?

À tout moment pendant le travail. Mais les futures mères demandent souvent la péridurale lorsque les contractions deviennent vraiment très fortes et/ou le col de l’utérus est dilaté à 5 ou 6 cm. Vers les 8-9 cm de dilatation, cette intervention ne sera plus nécessaire, car bébé devrait arriver très vite. En alternative, certains médecins proposent une rachianesthésie aux morphiniques de fin de travail si la future mère souhaite à tout prix atténuer la douleur. Elle est également efficace pour les situations difficiles en fin de travail.

 

Est-elle douloureuse ?

Il est vrai que le moment de la mise en place du cathéter et de l’injection peut être désagréable, mais la douleur ne dure pas longtemps grâce à l’anesthésie locale de la peau. Mais ce n’est pas pour autant que cette technique analgésique ne reste pas controversée. Certaines femmes la recommandent sans hésiter puisqu’elles ont pu rester très sereines au cours de l’accouchement. D’autres pourtant n’ont ressenti aucune sensation tandis que d’autres femmes encore n’ont été insensibilisées que d’un côté. Cela dépendra donc des réactions physiques de chacune.

 

Dans quel cas indiquer une péridurale ?

Généralement, elle se fait à la demande de la patiente pour faciliter son accouchement par voir basse ou par césarienne. Dans ce dernier cas en particulier, elle rend moins pénibles les suites de l’opération. Il existe cependant plusieurs situations où cette pratique est recommandée afin de normaliser les accouchements « difficiles ». Les cas sont nombreux pour ne citer que les antécédents de césarienne, la grossesse gémellaire, voire multiple, la présentation du bébé par le siège, l’accouchement provoqué, ou encore la fausse couche.

 

Existe-t-il des dangers pour la maman et le bébé ?

Étant donné que la péridurale est une anesthésie locale qui se pratique très fréquemment, le bébé ne court aucun danger. De plus, le produit anesthésiant ne se propage pas énormément dans le sang de la mère et donc par la même occasion dans le sang de l’embryon. Quant à la maman, elle peut ressentir plusieurs effets secondaires, mais ils disparaîtront très rapidement.

 

 

La péridurale n’a pas que des avantages

Outre les douleurs nettement atténuées au moment du travail, cette pratique permet de rester parfaitement consciente et donc d’être encore plus confiante pour donner naissance. Aussi, elle évite de pousser lorsqu’il le faut et lorsque l’anesthésie est bien dosée.

Néanmoins, elle peut provoquer des effets secondaires indésirables et passagers comme des nausées, des maux de tête, des tremblements, des frissons, une baisse de la tension artérielle, ou de la fatigue. Elle présente également quelques inconvénients pour ne citer que son inefficacité si elle n’a pas été posée au bon moment. Notez qu’il faut effectivement encore attendre que les produits agissent 15 à 30 minutes après les avoir injectés. Pourtant, toutes les opérations pour mettre en place l’injection durent environ 20 minutes. Si la péridurale est inefficace, il faudra réaliser une deuxième injection.

Aussi, le travail est généralement plus long étant donné que la future mère ressent moins de douleur. Avec des poussées inefficaces, voire inexistantes, les ventouses et les forceps sont davantage utilisés pour faire sortir le bébé. Certaines femmes qui y ont eu recours ont également eu du mal à uriner après l’intervention ce qui nécessite souvent un sondage vésical.

 

Que faire pour qu’elle se déroule dans les meilleures conditions ?

Certes, cette intervention présente quelques inconvénients, mais il est toujours possible de les atténuer au moment de la poussée. Pour cela, il suffit d’en parler au préalable à son médecin pour qu’elle soit plus efficace.

Et puis, tout commence bien évidemment par la pose de la péridurale et de l’injection. Pour qu’elle soit réellement efficace, mieux vaut adopter la bonne position : assise au bord du lit, penchée en avant avec le dos rond. Il ne faudra pas non plus oublier de bien respirer, c’est-à-dire d’inspirer profondément par le nez puis d’expirer lentement par la bouche.

 

Quelles sont les contre-indications à la péridurale ?

Elle est à éviter absolument en cas de :

  • > hémorragie
  • > hypovolémie (diminution de volume du sang)
  • > troubles de la coagulation et prise de médicaments anticoagulants

Par ailleurs, elle peut ne pas être recommandée en cas de :

  • > fièvre ou tout état infectieux au moment de l’anesthésie
  • > maladies cardiaques
  • > malformations au niveau de la colonne vertébrale

 

En présence d’un tatouage, la péridurale est-elle contre-indiquée ?

Cela a été scientifiquement validé : les encres utilisées pour les tatouages contiennent des pigments et de nombreux composants dangereux comme le composé organique dérivé de l’ammoniac, les amines aromatiques carcinogènes. Néanmoins, il est extrêmement rare qu’ils endommagent la peau. Le tatouage n’est donc pas un danger potentiel avant même la péridurale.

Au moment de l’anesthésie, il n’y a eu jusqu’à présent aucun risque de contamination lorsque l’aiguille de ponction pique et traverse le tatouage. La Société française d’anesthésie et de Réanimation (SFAR) est d’ailleurs très claire à ce sujet : il y a peu de risque que l’encre du tatouage arrive jusque dans l’espace péridural. Les fragments de tissus des couches superficielles ne passent effectivement pas dans les couches profondes de la peau grâce au mandrin (la tige cylindrique amovible en plastique ou en métal) qu’utilise l’anesthésiste. De plus, même sans mandrin, toutes les cellules qui participent à l’immunité (macrophages) assimileront ces fragments en détruisant les cellules infectieuses.

Pour minimiser les risques, il est préférable d’en parler au moment de la consultation d’anesthésie du huitième mois de grossesse. Le jour J, l’anesthésiste pourra ainsi contourner le tatouage en piquant soit dans une zone du tatouage qui ne comporte pas de pigment, soit dans l’espace péridural un peu au-dessous ou au-dessus du tatouage. Il peut également directement introduire l’aiguille dans le derme en incisant la peau de quelques millimètres pour n’entraîner aucun pigment en profondeur.

Aller plus loin

Information sur l’analgésie péridurale en obstétrique – http://www.ch-bourges.fr/hopital/informations.php?id_article=133